samedi 6 août 2022

Le handicap comme moteur artistique

J'ai toujours voulu écrire un article sur le handicap des artistes. Je trouve fascinant le fait de voir le handicap comme un moteur alors que par définition le handicap est un problème moteur. L'art est donc une façon de rendre aux artistes handicapés leur vie "normale". 

Une belle manière de montrer que le handicap peut être une source de beauté et de création artistique. 

Je vais ainsi traiter le handicap dans deux domaines particuliers, d'un côté le handicap des auteurs et de l'autre le handicap des peintres. 

1- Le handicap des auteurs:

Emily Dickinson: 

Emily Dickinson est une poétesse qui a souffert toute sa vie de migraines terribles et de problèmes de vue. Certains même disent qu'elle souffrait d'épilepsie. Cette derniere est un exemple que le handicap est une source d'inspiration et de talent parce qu'elle a écrit un poème au sujet de son handicap, les migraines. 

I felt a Funeral, in my Brain,
And Mourners to and fro
Kept treading - treading - till it seemed
That Sense was breaking through -

And when they all were seated,
A Service, like a Drum -
Kept beating - beating - till I thought
My mind was going numb -

And then I heard them lift a Box
And creak across my Soul
With those same Boots of Lead, again,
Then Space - began to toll,

As all the Heavens were a Bell,
And Being, but an Ear,
And I, and Silence, some strange Race,
Wrecked, solitary, here -

And then a Plank in Reason, broke,
And I dropped down, and down -
And hit a World, at every plunge,
And Finished knowing - then -

Le simple titre de ce poème, "J'ai senti un enterrement dans ma tête" est très révélateur. Tout le long de ce  poème, Emily Dickinson décrit l'affreusité de son handicap, de sa maladie, mais ce qui est extrêmement fascinant c'est le fait qu'Emily décrit sa maladie de façon très esthétique, très belle, ca devient presque un euphémisme de ce qu'elle ressent. Elle rend sa maladie "belle" en quelque sorte même si les lignes de son poème veulent dire le contraire, liées ensemble, elle créent un sentiment d'impuissance, de désespoir, de tristesse mais un sentiment qui est beau malgré tout. Ainsi, pour Emily Dickinson, écrire était plus important que vivre et la maladie n'avait aucun impact sur ses poèmes, sur son art, au contraire c'était une source d'inspiration pour son art, un moyen de pousser jusqu'au fond d'elle-même pour en ressortir des sentiments de douleur, de colère, d'impuissance. 

Emily Dickinson est la preuve que souffrir d'un handicap est certes terrible au quotidien mais il peut aussi servir à developper ses capacités intellectuelles, artistiques pour créer de la beauté autour de soi et s'auto-convaincre que ce n'est pas aussi grave que ça en a l'air. Emily estimait que tant que son handicap n'atteignait pas son écriture et sa capacité à écrire et à produire des oeuvres d'art, elle n'y prêtait pas attention et le voyait positivement au lieu de s'arrêter au fait accomplit et de souffrir encore plus. 

Charles Baudelaire:

Baudelaire est un autre exemple que le handicap peut être une source d'inspiration. Ce dernier souffrait de deux graves problèmes, il souffrait d'une dépendance à l'opium et d'un trouble mental "la bipolarité". Cependant, malgré le fait que dans notre vie de tous les jours nous avons tendance à croire que ces deux problèmes sont des "malédictions". Pour Baudelaire, ces deux problèmes étaient ses "muses". En effet, sa bipolarité et sa dépendance à l'opium laissaient place à sa créativité et à son génie. De nouvelles portes artistiques s'ouvraient à lui lorsqu'il consommait cette drogue et son trouble bipolaire l'aidait à voir le monde différemment en fonction de son état d'esprit, s'il était triste, il exprimait dans ses écrits sa tristesse et s'il était heureux, il exprimait dans ses écrits sa joie. Mais cette bipolarité le poussait à aller dans deux extrêmes l'extrême tristesse ou bien l'extrême joie ce qui mettait encore plus en valeur ses ressentis et lui permettait de mettre sur papiers ces élans temporaires mais intenses d'émotions aussi fortes les unes que les autres. 

2- Le handicap des peintres:

Frida Kahlo:

Frida Kahlo est l'exemple même que le handicap est une source d'inspiration, plus que ça un défi à relever et une manière de voir les choses. Toute sa vie Frida Kahlo a souffert de la maladie "poliomyélite", elle était à moitié paralysée et bien qu'elle soit paralysée physiquement ça ne l'a pas paralysé de se remettre à la peinture. 

Elle s'est battue chaque jour pour peindre et pour exprimer son handicap à travers ses tableaux, elle n'a jamais eu honte de son handicap, au contraire elle a choisi de l'exprimer dans ses oeuvres, dans ses tableaux, d'en faire sa force et sa particularité. Frida Kahlo était donc une artiste qui représentait son handicap comme un cadeau plutôt qu'une fatalité. 

Frida Kahlo exprimait son mal-être dans ses oeuvres, la peinture fut sa bouée de sauvetage, son exutoire. 

Elle affirmait même que "On me présentait comme une surréaliste, mais je ne l'étais pas. Je n'ai jamais peint de rêves, j'ai peint ma réalité". 

Cette dernière a même peint un tableau représentant son accident de bus, un drame qui l'a détruite physiquement et moralement, un drame qui ne l'a pas laissé indemne. Dans le tableau "La colonne brisée" (1944), Frida se représente le corps perforé de clous, la colonne vertébrale apparente. Ainsi, le désert derrière elle ne peut représenter que la solitude qui l'entourait suite à cet accident, cette douleur et cette souffrance très vaste qui l'empêchait d'être libre comme elle le voulait, comme elle en avait toujours rêvé. Frida Kahlo ne pouvait partager sa souffrance physique qu'à travers ses oeuvres, ainsi, grâce à son talent, elle était moins seule, elle arrivait à communiquer sa détresse aux gens à travers ses peintures, le plus souvent des autoportraits.



Claude Monet:

Claude Monet est un artiste qui vers la fin de sa vie a eu un très grand handicap. Il a eu des problèmes de vue, une maladie qui s'appelle la cataracte. Suite à cette maladie, Monet a été contraint de se replier chez lui, dans sa maison à Giverny, il ne voyait plus très bien les couleurs et c'est grâce à ce handicap que Moent a peint ses plus belles oeuvres d'art, les nymphéas sont un produit de ce handicap. Ainsi, avec Monet, son handicap a été une source artistique, une inspiration, un moyen de voir différemment ce qu'il ne pouvait pas voir. L'artiste est avant tout artiste parce qu'il voit le monde différemment, il s'approprie les choses réelles à sa manière et reconstruit toutes les choses qui existent. Ainsi, Monet grâce à son handicap s'est encore plus rapproché de cette vision de l'artiste. 

"Je vois bleu, je ne vois plus le rouge, je ne vois plus le jaune, ça m'embête terriblement parce que je sais que ces couleurs existent, parce que je sais que sur ma palette, il y a du rouge, du jaune, il y a un vert spécial il y a un certain violet, je ne les vois plus comme je les voyais dans le temps, et pourtant je me rappelle très bien les couleurs que ça donnait".


                                                     Avant la cataracte (le bassin aux nymphéas) 


Après la cataracte (le bassin aux nymphéas)






1 commentaire:

  1. Très intéressant cet article ! J'ai appris pas mal de choses et notamment que ces artistes avaient un handicap. Ils ont eu une vraie force pour réussir à faire de telles œuvres.

    RépondreSupprimer